M. Fresco, j’ai remarqué dans votre travail une grande foi dans le changement et
une attitude très positive à l'égard de choses qui semblent impossibles, ou du moins
possibles dans un futur lointain (comme la prévision de la colonisation de la mer), la
question que je me pose est : d’où tirez-vous cette grande confiance pour les défis?
En travaillant dans l’industrie aéronautique, j’ai beaucoup appris sur les avions qui se meuvent
en trois dimensions et subissent de vastes gammes de contraintes. Il était essentiel de prendre
en compte de multiples choses qui diffèrent des structures statiques au sol. Il y avait des défis
tels que simplifier la conception, éliminer les gaspillages visibles et obtenir la plus grande
performance avec le minimum de dépenses d'énergie.
Un autre facteur encourageant mon attitude positive envers la résolution de problèmes
fut la Deuxième Guerre Mondiale, lorsque les États-Unis dépensèrent des milliards de dollars
pour les armes de destruction massive dans le cadre du Projet Manhattan. Le coût ne fut pas
un problème, et ce fut l’un des projets entrepris les plus larges et mieux financés jusqu’à cette
date. Je réalisai que les mêmes énergies qui furent mises au service du Projet Manhattan
pouvaient être canalisées pour améliorer et actualiser notre mode de vie ainsi qu’atteindre
et maintenir des relations symbiotiques optimales entre la nature et l’humanité. Si nous sommes
prêts à dépenser autant d’argent, de ressources et de vies humaines en temps de guerre,
nous devons nous demander pourquoi nous n’engageons pas autant de ressources
pour améliorer l'existence de chacun et anticiper les besoins pour l’avenir en temps de paix.
Quand les scientifiques furent appelés pour résoudre des problèmes d’ordre militaire, les réponses
furent immédiates. Ceci me démontra la capacité de la science et de la technologie à résoudre
les problèmes lorsque cela est correctement organisé et financé. Il est en revanche honteux
que ces méthodes ne soient pas appliquées lorsqu’il s’agit de résoudre des problèmes sociaux
à échelle mondiale. De même, il est scandaleux que des milliards soient dépensés dans des projets
spatiaux à la terraformation de planètes inhabitées pour les rendre habitables, alors que notre
propre planète est négligée et que notre terre, notre eau et notre air sont pollués. Dans mon
travail, je ne tente pas de prédire le futur. Je souligne juste ce qu’il est possible de faire avec
une application intelligente et une utilisation humaine de la science et de la technologie. Cela n’est
pas un appel à une gestion de la société par les scientifiques. Ce que je suggère est d’appliquer
les méthodes de la science au système social pour le bénéfice de l’humanité et de l’environnement.