ToutMa ToutMa n°45 - Juin - Juillet - Août 2017 | Page 16

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RENCONTRE
ENTRETIEN _ Julie MANDRUZZATO

Jessica FOX une réussite qui pousse en eaux vives

Dévalant le canal de ses yeux bleus , nous slalomons au travers de son récit l ’ enthousiasme propre à tous les champions . Âgée de 22 ans seulement , Jessica possède un palmarès que l ’ on dit printanier parce que fleurissant . Inlassablement active , entraînée pour gagner . Portrait d ’ une kayakiste née à Marseille qui remportait aux Jeux Olympiques 2016 , la médaille de bronze pour l ’ équipe Australienne .
ToutMa : Tu es partie de Marseille à l ’ âge de 4 ans , et tu habites aujourd ’ hui en Australie . Tu es restée attachée à ta ville d ’ enfance ?
Jessica Fox : J ’ y suis née alors je pense que j ’ aurai toujours cet attachement à la ville et à sa région . Mais mon père ( Richard Fox ) a obtenu un poste en Australie pour préparer les J . O . de Sydney 2000 et on y est restés ! Ma mère ( Myriam Fox-Jérusalmi ), elle , est devenue entraîneuse nationale de l ’ équipe de kayak australienne . Mais j ’ ai des amis et une partie de ma famille à Marseille alors tous les ans on essaie de passer du temps avec eux , même si ça devient de plus en plus compliqué avec les conditions d ’ entraînement de kayak … Je rêve d ’ un bassin à Marseille pour pouvoir y passer plus de temps !
TM : Le kayak , on a ça dans l ’ éducation , dans le sang ou dans les bras ?
JF : Hmm … je ne sais pas . J ’ ai fait mes premiers coups de pagaie dans un kayak à l ’ âge de 6 mois ! Ok , c ’ était seulement pour une photo , mais j ’ ai aussi passé beaucoup de temps au Club de Marseille Mazargues où mon papi entraînait les jeunes ( comme Denis Gargaud , le Champion Olympique 2016 ). Puis lorsqu ’ on est partis en Australie on faisait régulièrement du bateau . J ’ ai commencé le kayak en eaux vives , à Penrith , à partir de 12 ans , et là , j ’ étais à fond ! J ’ ai eu la chance d ’ avoir mes parents pour m ’ apprendre les techniques basiques car c ’ est important d ’ avoir de bonnes habitudes dès le début . Après je suis toujours restée entourée par les meilleurs athlètes sur le bassin , je connaissais l ’ histoire de mes parents et leur parcours de haut niveau . J ’ ai beaucoup appris en observant . Si c ’ est dans le sang … ? Je ne sais pas . Je pense qu ’ ils m ’ ont donné les gènes de compétiteurs ! Et surtout , l ’ envie d ’ apprendre et de travailler dur pour progresser .
TM : Quelles sont les différences lorsque tu t ’ entraînes dans un club français et dans un club australien ? On les trouve où nos rivières alpines en Australie ?
JF : Malheureusement ici on n ’ a pas beaucoup de rivières comme en France . Il y a de belles rivières naturelles en Tasmanie et quelques-unes dans l ’ état de la Nouvelle-Galles du Sud mais il y a rarement assez d ’ eau . En France , on compte des centaines de clubs de kayak . En Australie pour le slalom , on les compte sur les doigts d ’ une main ! J ’ adorais faire les stages avec le club MMCK en France . On partait quelques jours à l ’ Argentière-la-Bessée pour faire de l ’ eau vive . Le trajet en camion , les jeux de cartes entre les séances et les descentes de la Durance … c ’ était vraiment sympa . J ’ adore l ’ esprit club que l ’ on retrouve en France , c ’ est ce qui nous manque ici . Pour ce qui est de Sydney , on a la chance d ’ avoir le bassin de Penrith où on essaie de former la nouvelle génération . Il a été construit pour les J . O . de Sydney 2000 . Il attire beaucoup d ’ athlètes internationaux pour les entraînements hivernaux .
TM : Aux derniers J . O . tu as remporté une médaille . Mais tu ne t ’ arrêtes pas pour autant ?
JF : En 2016 j ’ ai remporté le bronze après avoir eu l ’ argent à Londres en 2012 . Mon objectif c ’ est toujours de naviguer à mon potentiel et je vise la meilleure marche à chaque compétition . A Rio , je rêvais de l ’ or mais à cause du vent , j ’ ai été trop prudente et je ne me suis pas lâchée . Mais gagner une médaille c ’ était quand même un moment génial . Je suis fière de mon parcours de ces quatre dernières années . Ça me donne plus de motivation pour les quatre à venir !
TM : Tu te prépares pour les prochains Jeux , mais comment ? Quels autres évènements couvres-tu ?
JF : On vient de finir nos sélections . C ’ était une belle course , avec beaucoup d ’ athlètes européens . J ’ étais contente de mes performances et fière de ma petite sœur qui est aussi sélectionnée pour ses premiers championnats du monde en C1 ! Maintenant je vise les coupes et les championnats du monde des moins de 23 ans . C ’ est une année très chargée et je compte faire toutes les courses . Il y a plusieurs athlètes qui préfèrent se focaliser sur seulement 2 ou 3 courses dans l ’ année pour préparer les mondiaux , mais moi j ’ adore courir . Je trouve qu ’ on apprend à chaque fois qu ’ on prend un départ .
TM : Quelle est la journée typique d ’ une championne comme toi ?
JF : Je m ’ entraîne une fois par jour sur l ’ eau vive , la séance dure environ 1h20 et c ’ est souvent une séance technique . L ’ après-midi c ’ est une séance sur le plat ou en salle de muscu , ou un footing . Selon les semaines , j ’ ai une séance de kiné ou un massage , l ’ analyse vidéo des courses et une sieste ! En même temps , étant toujours étudiante , je suis des cours par correspondance en psychologie et en communication . Pour rester en forme physique j ’ essaie de bien m ’ étirer , dormir assez et boire beaucoup d ’ eau . La nourriture fait aussi partie de la préparation . Finalement , rester en forme c ’ est autant mental que physique . Il faut apprendre à se détacher mentalement après une journée de kayak … C ’ est difficile dans ma famille !
TM : Tu as 22 ans , d ’ autres projets en dehors du kayak ?
JF : Oui je pense qu ’ avoir un double projet est important pour préparer la vie après le sport . J ’ essaie le plus de choses possible : présenter des programmes TV , écrire des blogs pour des sponsors , faire des conférences pour des écoles ou des entreprises … Je fais aussi partie de la commission des athlètes pour le Comité Olympique Australien .
TM : Quelles sont les choses qui te manquent le plus en France ?
JF : Ma famille , les boulangeries ( c ’ est fou , il n ’ y a pas de bon pain ici !), les Calanques et … les expressions marseillaises !
Eté 2017 _ TM n ° 45 14
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