ToutMa ToutMa n°41 - COLLECTOR | Page 61
agenda
L’EXPO
TEXTE _Jacques LUCCHESI
Mission Mode
ou
le croisement des styles
Entre l’armée et le monde de la mode il y a, contre toute
attente, plus d’un point de rencontre. C’est ce que montre
cette exposition insolite organisée conjointement par le
musée Borely et le musée de la Légion.
MISSION MODE
du 16 septembre 2016
au 15 janvier 2017
Musée des Arts décoratifs
Château Borely
134 avenue Clot Bey, Marseille 8ème
04 91 55 33 60 _5€
_www.mission-mode.fr
Une conférence-projection (à la BMVR
l’Alcazar) et des visites commentées dans les
deux musées associés, complèteront cette
exposition dont le vernissage, jeudi 16
septembre, promet d’être un moment fort
de la rentrée culturelle marseillaise.
C
©Ville de Marseille - Photo David Giancatarina
Musée de la Légion
route de la Légion, Aubagne
04 42 18 12 41 Entrée libre.
Jean-Paul Gaultier
Tailleur sans manches,
Printemps/été 2008
collection Les Pirates
’est dans ce constat que s’origine le projet
de cette exposition originale, conçue
par Xavier Landrit (historien de la mode)
et Christine Germain (directrice du musée
Borely). Cependant les deux commissaires
ont vite compris qu’elle serait incomplète
sans le concours d’un autre homme de l’art,
le capitaine Renaud Seznec, conservateur
du musée de la Légion, près d’Aubagne.
Ensemble, ils ont élaboré un parcours édifiant
qui chemine à travers ces deux espaces
muséographiques. Cette double visite s’impose
donc à qui veut saisir, non seulement les enjeux
sociaux, mais aussi les relations causales entre
ces deux champs de l’activité humaine.
S
©Ville de Marseille - Photo David Giancatarina
outenue par d’importants sponsors
commerciaux (Balas Textiles, les Galeries
Lafayette, les Terrasses du Port) et de prestigieuses
maisons de mode (Chanel, Dior, Louis Vuitton,
entre autres), cette exposition s’articule sur
cinq moments historiques qui constituent ici
autant de sections.
D
Yves Saint Laurent
Veste saharienne lacée,
Saint Laurent Rive Gauche,
Printemps/été 1969
Collection Didier Ludot Paris.
Septembre / Octobre 2016 _TM n°41 Collector 10 ans !
ans la première, on revisite l’aventure
coloniale française, au XIXème siècle, à
travers les uniformes de ses soldats. Pour les
adapter aux climats désertiques et tropicaux,
les couturiers d’alors optèrent pour le blanc et,
plus tard, pour le kaki.
59
© Légion
ien, de prime abord, ne semble plus éloigné
de l’uniforme militaire que la mode et
ses audaces. Le premier évoque la rigueur et
la fonctionnalité ; la seconde appelle, comme
son ombre, l’innovation créatrice et le plaisir
esthétique. Et pourtant, ce préjugé s’effrite vite
sitôt que l’on gratte un peu le sujet. A l’examen,
on découvre que des couturiers, parmi les plus
renommés - Yves Saint-Laurent, JeanCharles de Castelbajac, Karl Lagerfeld,
Jean-Paul Gaultier - ne se sont pas privés de
puiser dans l’alphabet vestimentaire du soldat
pour stimuler leur propre inspiration. Loin de
se limiter aux épaulettes et aux boutons dorés,
cette transversalité appliquée a parfois produit
de nouveaux vêtements qui sont rapidement
devenus des incontournables de la garde-robe
moderne.
étrangère
R
Groupe de légionnaires du 2ème régiment étranger d’infanterie (REI)
en tenue nouvelle génération Félin.
A
u XXème siècle, l’influence des deux guerres
mondiales - intitulé de la deuxième section
- s’exercera aussi dans le domaine de la mode,
en particulier avec l’expansion de la couleur
dite « camouflage ». Au niveau des coupes, on
verra, après la Libération, les épaules des vestes
civiles s’élargir et s’orner de cols officiers.
C
’est une « invitation au voyage » que
propose la troisième étape, puisqu’elle
met à l’honneur la fameuse veste-safari.
Robuste et légère à la fois, elle deviendra vite
un indispensable pour les touristes occidentaux
qui allaient en Afrique pour chasser ou faire des
safaris photos. Elle façonnera durablement le
style « aventurier » et sera largement exploitée
par Hollywood (voir Clark Gable dans
« Mogambo » de John Ford).
P
lus tard, en 1967, c’est sa descendante,
la « saharienne », qui fera sensation dans
les collections de haute couture avant que
le marché du prêt-à-porter ne s’en empare.
Loin d’être limité au registre masculin, elle
s’adaptera aussi au corps féminin, associant
élégance et sportivité.
C
’est avec les seventies et leur demande
quasi générale de décontraction
vestimentaire, que surgira le « style brousse »
- qui termine ce parcours. Lui aussi s’inspire
du magasin militaire, mais ses soldats ne
défileront que sur les podiums des grandes
maisons, comme Thierry Mugler.
D
éjà partenaire de la Chapelle des
Pénitents Noirs pour l’exposition Hans
Hartung, au printemps dernier, le musée de
la Légion s’affirme peu à peu comme un lieu
d’art à part entière dans le département.
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