ReMed 2018 ReMed Magazine N°4 - Cutting Edge | Page 37

aujourd’hui peut lui être totalement inutile demain. Un ordi- nateur est un trésor pour celui qui en connait la valeur, mais comme disait Chester HIMES : « sous les doigts du Crétin, c’est un revolver manié par un aveugle au milieu de la foule. » L’Ecole de l’intolérance « Si le bébé est déjà une personne, il n’est pas un individu, ni l’enfant, ni l’adolescent. L’individu se définit comme une quête le plus souvent inaboutie. On dénude l’élève de ce qu’il pour- rait savoir, afin de retrouver son ‘‘être même’’, son ‘‘authentici- té’’, qui seule lui permet de construire un ‘‘projet personnel’’ à chaque fin de cycle d’études. » Quel type d’individu produira donc cette école centrée sur l’égo d’élèves non encore sortis du stade sadique freudien ? Un ignorant diplômé, obnubilé par son nombril du type des bougres de la télé-irréalité, où la seule réalité est celle du spectacle et de la mise en scène. Il faut certes être à l’écoute de l’élève mais pour corriger ses informations et non pour justifier le fait que lui n’écoute plus. Au sein de l’école, il n’est une personne que parce qu’il est élève, rien ne justifie une distinction entre eux. Comme précisé plus haut, l’ostracisme des écoles selon les lois de Darwin ou encore celles de Mandel, ne sert qu’à entériner les injustices sociales et conduit l’élève à se recro- queviller sur lui-même donnant à ce qui le différ encie des autres un masque d’identité. Après la génétique, l’Ecole se soumet au marché L’école devra désormais « faire comprendre la valeur de l’entreprise au sens le plus large possible du terme, c’est- à-dire l’empressement pour résoudre des problèmes (…) plus à même de stimuler l’esprit d’entreprise et d’ini- tiative dont les étudiants, les personnes en formation et les diplômés ont besoin. ». Les objectifs de la Com- mission Thélot servent à produire un être avec assez de connaissances, pour pouvoir absorber durant le reste de son existence des formations éphémères le modelant aux vicissitudes des exigences immédiates de l’écono- mie ; « des compétences de base qui mettront l’élève moyen juste au-dessus du niveau d’un berger allemand. » Les enseignants ne sont pas épargnés par les tentacules des entreprises. La Commission a également proposé, pour encourager l’esprit de compétition et le recrutement des enseignants, le salaire en fonction du mérite, c’est-à-dire des matières enseignées qui répondent à la demande du marché, un jour les mathématiques un, autre l’informatique. L’Ecole des inégalités De l’iniquité de la formation pré-bac, ne peut découler que de l’iniquité post-bac. Contredisant les lois de la génétique, l’accession aux grandes écoles dépend moins des compé- tences des étudiants que de leur rang social. « Jamais il n’y a eu si peu de filles ou de fils d’ouvriers et d’employés dans les grandes écoles, au point que Sciences-Po, dans un splen- dide exercice de charité chrétienne, a ouvert son école pari- sienne sans concours à quelques banlieusards méritants. » Quelle est la chance qu’un banlieusard finisse président de la République ? Nulle. Elle existe sur le papier, comme celle d’être frappé par la foudre au milieu du désert du Tassili en plein été. En clair, si on nait dans la rue, on y meurt aussi. L’école est censée être la ruche regroupant des abeilles indistinctes, servant inconditionnellement la Reine Connaissance. Elle doit offrir des chances égales de réus- site. L’injustice sociale doit rester à la porte de l’école. Quelle école pour demain ? Le rôle quotidien de l’école est que l’élève rentre chez lui chaque soir avec une tête plus remplie. En classe, il doit écouter et apprendre et soumettre toutes les bribes d’in- formations ramassées pêle-mêle des réseaux sociaux, des clichés et des idées reçues, à un cadre objectif et savant. L’écolier ne cherche pas à être conforté dans son brouhaha cérébral mais à l’opposé, il aspire à y mettre de l’ordre. Il est respecté pour ce qu’il est, élève. Et rien d’autre. Pour devenir “entièrement” respectable, il doit apprendre à travailler et réfléchir afin de sortir de son ignorance. Le maitre doit cap- tiver ses élèves par la « fascination du savoir (…) Il lui suffit d’être admirable, à leur niveau. » L’enseignant ne doit plus céder aux pressions du système et des parents qui s’occupent plus du bien-être de leurs reje- tons que de leur tête, quand il fait des dictées, ou demande des devoirs à faire à la maison. L’école ne doit pas être un centre de formation pré-entre- prise ou de pré-spécialisation. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, ce n’est pas la spécialisation qui per- met l’adaptation, mais une maitrise solide des principes et concepts généraux. Afin de ne plus produire des diplômés ignorants, inconscients que quelque chose ait pu exister avant leur naissance, pensant que les concepts et principes d’aujourd’hui sont tombés du ciel, il est indispensable de restaurer l’Histoire, l’Art et d’y associer la Langue et la Littérature. Ce faisant, le BAC reprendra naturel- lement son aura. « On pourrait être tenté de le supprimer, et de lui substituer des examens d’entrée en université. Mais une épreuve nationale aura toujours plus de garanties d’objectivité que des épreuves régionales, où la tentation interventionniste serait davantage présente. » Sans oublier les enseignants. Leur formation doit aussi être ré- étudiée, car la réussite de l’école dépend essentiellement d’eux. En effet, ils ne doivent pas encourager le mimétisme qui forme des automates, au contraire ils doivent stimuler l’esprit critique des élèves, car l’Education c’est l’émancipation. Références BRIGHELLI Jean-Paul - La Fabrique du Crétin - CDD 1 : Contrat à Durée Déterminée - ANPE 2 : Agence Nationale Pour l’Emploi - BEP 3 : Brevet d’Etudes Professionnelles - Bac pro 4 : Bac Professionnel - BTS 5 : Brevet de Technicien Supérieur - BEPC 6 : Brevet d’Études du Premier Cycle (collège) ReMed Magazine - Numéro 4 37