Montréal pour Enfants vol. 17 n°3 Été 2017 | Page 8

8 vie de famille www.montrealpourenfants.com ou les activités, même à leur propre détriment, qu’un parent expérimenté. » Les parents et leur conjoint doivent aussi finir par accepter le fait que, si cer- taines complicités peuvent apparaître de manière plus spontanée avec certains enfants, l’histoire d’amour qui unit d’abord les conjoints n’im- plique pas forcément que le nouveau partenaire partage envers ses enfants le même amour inconditionnel : « Le parent peut ressentir cela comme ça : “Si tu m’aimes, tu dois aussi aimer mes enfants.” L’amour peut se déve- lopper et on peut se donner les moyens pour que la relation devienne positive et que l’on s’aime bien, voire que l’on s’aime. Mais le sentiment affectueux ne se commande pas. C’est une des attentes qui va vraiment complexifier la vie des familles recom- posées. Les femmes s’investissent particulièrement et beaucoup pour combler cette attente : “Je vais lui prouver que je l’aime en aimant ses enfants” ». À travers ces premières adaptations, les nouveaux partenaires en viennent aussi, forcément, à faire le deuil d’un autre espoir assez courant, qui est celui qu’avec beaucoup de bonne volonté, la gestion des aléas de la vie familiale peut devenir une chose facile : « Les gens qui n’ont jamais eu d’enfant, qui voient un enfant turbulent dans une autre famille, pensent : “Si, moi, j’étais le parent, je ferais telle chose, et il se calmerait”, alors que nous savons très bien que ce n’est pas toujours aussi facile de discipliner ou de parler à un enfant. Parfois, quand on forme une famille recomposée et que l’on n’a jamais vécu avec des enfants, on peut avoir ce type de croyance qui fait que l’on prend conscience que ça ne fonctionne pas comme ça. On peut vivre de la déception ou commencer à cultiver des accusations à propos de notre conjoint en pensant “S’il avait été pris tout de suite au début et bien encadré, peut- être que l’enfant ne serait pas comme ça” », raconte Claudine Parent. Bien sûr, on est loin du long fleuve tranquille, mais une fois ce constat accepté, Pascale Reny se souvient d’avoir été témoin de situations où les épreuves parta- gées, plutôt que de créer une distance, ont contribué à souder les liens : « Par exemple, en début de relation, un enfant peut avoir un accident. Cela fait en sorte que celui qui est le parent de l’enfant doit prendre beaucoup de temps avec lui et que le nouveau conjoint, tout d’un coup, se retrouve dans l’obligation d’aider son nouveau partenaire en s’inves- tissant davantage auprès de ses enfants. » Les nouveaux conjoints, au-delà de l’étincelle Par-delà ces mythes et ces espoirs à la fois fous et naturels pour des partenaires en proie aux charmes des débuts et aux risques de déception, arrivent irrémédiablement les grandes questions quant à la place que les conjoints sont prêts à prendre dans la vie de chacun. Où en est-on dans son processus de rupture ? A-t-on envie d’une vie de famille ? Est-ce que les qualités qu’on trouve chez l’autre valent la peine que l’on accepte les compromis, en termes de temps, de calme et de disponibilité, qui viennent avec la vie de famille ? Jusqu’où est-on prêt(e) à négocier avec l’idée d’un(e) ex-conjoint(e) dans le paysage ? Ces réajustements permettent néanmoins à bien des parents de voir que le jeu en vaut la chandelle, à condition, la plupart du temps, que leur partenaire ait des valeurs familiales fortes, les partage et ait l’impression d’être prêt(e) à s’investir : « Si on a des différences importantes de valeurs, une valeur, ça ne se change pas comme un comportement. C’est profond en soi. En fait, ça ne se change pas. C’est en nous. Des gens qui ont des valeurs familiales très fortes, qui se retrouvent ensemble lors d’une recomposition familiale, vont être capables de mettre les enfants au cœur de leur projet. Ils vont réussir à faire abstraction de certains inconvénients et com- promis parce qu’il y a des enfants présents », avance Claudine Parent. Et si certains points peuvent faire l’objet de négo- ciation, les nouveaux partenaires apprendront aussi, en cours de route, que d’autres font partie inhérente de la vie avec des enfants : « La première chose à laquelle renonce un parent célibataire qui accepte de s’investir dans une famille recomposée, c’est son