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22 KRAEMER—30 ANS HISTOIRE passer par d’autres voies. Et notamment par l’identification à un lieu et à une personne de manière singulière, voire personnalisée. Dans le domaine de la coiffure, les clientes aiment qu’on s’occupe d’elles, on serait tenté de rajouter qu’on ne s’occupe que d’elles  ! Une fois identifiés le salon et le coiffeur, une fois installée la relation de proximité – voire d’intimité –, elles sont prêtes à manifester leur fidélité sur la durée. Sur la base de cette analyse qu’il s’est forgée avec une solide expérience, Yannick Kraemer élabore à l’orée du XXI e siècle un concept qui vise trois cibles : la clientèle, les collaborateurs mais aussi les futurs partenaires. Cette triple finalité passe par sa volonté d’insuffler un esprit créatif à l’ensemble de ses collaborateurs afin qu’ils puissent, eux aussi de manière valorisante, apporter leur contribution aux développements des codes esthétiques de la marque. «  C’est pour cela qu’au sein du groupe, nous explique-t-il, chacun est en mesure de créer son espace personnel. Cela per- met à la clientèle de chercher à en savoir plus sur la personnalité de la personne qui les accueille et les goûts propres du “maître des lieux”. Au-delà du service proposé, le choix de ce lieu est essen- tiel ; il doit avoir une âme. Il faut que la cliente ait d’emblée un coup de foudre. Pour cela, il s’agit de créer de nouveaux univers, riches en émotion, chargés de culture et de mémoire.  » Ces choix stratégiques s’appuient sur la force du groupe, mais aussi sur la volonté tenace qui anime Yannick, ce «  tempérament d’entrepreneur » qu’il manifeste avec une conviction grandissante. Une manière sans doute de faire parler différemment « la créativité qu’il sentait en [lui] », aussi bien par le biais des collections que par le développement du groupe. Les clés du succès Comme il l’avait projeté à l’origine pour le salon familial d’Hatten avant de parfaire sa formation à Strasbourg, puis à Paris, Yannick Kraemer repense ses salons comme des lieux de détente. « Des temples dédiés à la relaxation, dans “  On fustige aujourd’hui la globalisation, mais quand celle-ci se met au service de l’échange des cultures, des voyages et des rêves, je la trouve profitable pour tous ”  lesquels les prestations, les shampooings, soins et massages, sont conçus comme des instants de passage vers un autre monde. » Cette vision, il la doit à ses nombreux voyages en Asie. Dès 1996, au moment de réaménager le salon historique de la rue des Serruriers, il situe l’instant du shampooing «  comme le moment le plus relaxant ». Il le conçoit comme un « instant de détente inouï » qu’il lui faut prolonger. De plus, il constate, dans les salons asiatiques qu’il observe, que l’espace dédié au shampooing est placé à l’écart, « isolé du bruit et de la lumière », avec des bacs allongés. À cette époque-là, ce type de bac, malheureusement, n’existe pas. Yannick consulte les fabricants européens, mais personne ne dispose de forme allongée. Dès lors, il se tourne vers des industriels, dont Cindarella, un créateur de mobilier pour les professionnels de la beauté. Il se rend à Combs la Ville, le siège de la société et échange avec madame et monsieur Amellal. Yannick découvre une installation allongée qui pourrait se rapprocher de ce qu’il a en tête, mais il la juge inadaptée au monde de la coiffure. En industrielle avertie, madame Amellal se montre ouverte et lui dit : « M. Kraemer, nous sommes des industriels et nous sommes à l’écoute.  » Yannick la prend au mot, se munie d’un crayon et dessine une forme particulière qui favorise la position allongée durant le lavage des cheveux et les soins du visage, avec un siège ergonomique destiné à épouser parfaitement les formes du corps. Pour la partie basse, il croise deux demi-cercles imbriqués en s’inspirant du symbole du Yin Yang et inscrit l’instant de relaxation en relation avec tous les aspects de la vie et de l’univers. « L’eau chaude sur la nuque, le massage du cuir chevelu, tout cela crée une sensation de bien-être dont le client ne profite pourtant pas assez. Bien souvent, constate-t-il, elles n’osent pas se laisser aller à fermer les yeux et à se détendre complètement. Peut-être est-ce à cause du regard des autres ou de l’atmosphère