Flashmag Digizine Edition Issue 114 February 2021 | Page 23

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A gauche Lumumba au Milieu Kasa - Vubu le president du Congo

Lia_Samantha

Le sous-secrétaire d’État Clarence Douglas Dillon explique aux responsables réunis autour du président Eisenhower qu’il est indispensable d’empêcher Lumumba de chasser les Nations unies du Congo. Lumumba, indique-t-il, travaille pour servir les objectifs des Soviets. Dulles surenchérit : « Lumumba est à la solde des soviétiques [in Soviet pay] » Eisenhower intervient alors : il est « simplement inconcevable » que l’ONU soit chassée du Congo.

Et les États-Unis doivent tout faire pour que les Nations unies restent, « même si une telle action devait être utilisée par les Soviets comme point de départ d’un conflit [as the basis for starting a fight] ». Eisenhower demande-t-il, lors de cette réunion, l’élimination physique de Lumumba ? La question continue à faire débat, les historiens s’interrogeant sur les souvenirs de Robert Johnson, l’un des membres du NSC, devant la commission Church: « À un moment pendant les discussions, a expliqué l’ancien responsable, le président Eisenhower a dit quelque chose — je ne me souviens plus précisément des mots qu’il a employés — qui m’est apparu comme un ordre pour l’assassinat de Lumumba, au cœur du conflit politique et de la controverse au Congo. Il n’y a pas eu de discussion ; la réunion a simplement continué. » Le lendemain de la réunion, en tout cas, le siège de la CIA donne son feu vert à Léopoldville pour lancer l’opération de remplacement de Lumumba.

Une semaine plus tard, le 25 août, le dossier congolais est à nouveau abordé à Washington dans le cadre du « Special Group », un sous-comité du NSC chargé des opérations secrètes. Cinq hommes participent à la réunion. Thomas Parott de la CIA fait le point des actions menées par l’agence « pour monter une campagne anti-Lumumba au Congo », au travers de certains groupements professionnels et d’un projet de vote de défiance contre Lumumba au Sénat congolais.

Gordon Gray, l’assistant spécial du président Eisenhower pour les affaires de sécurité nationale, prend la parole. La formule qu’il emploie cherche à protéger Eisenhower, mais le message est sans ambiguïté : une conviction « extrêmement forte » a été exprimée sur la nécessité d’une « action très directe [very straightforward] ». Bref Einsenhower donne l’ordre d’exécuter Lumumba, ou en tout cas ne s’y oppose pas. Les plans qui ont été présentés sont-ils suffisants ? Dulles, le directeur de la CIA intervient à son tour : il a pris en compte « sérieusement » ce qu’on lui a demandé et a bien l’intention de mettre les choses en œuvre « aussi vigoureusement que la situation le permettra ou le requerra ».

Manifestement sous pression, le directeur de l’agence câble lui-même dès le 26 août àDevlin de nouvelles instructions : « En haut lieu ici, on en arrive à la conclusion claire que si Lumumba continue à détenir des fonctions importantes, le résultat inévitable sera au mieux le chaos et au pire l’ouverture de la voie à une prise de pouvoir communiste au Congo, avec des conséquences désastreuses pour le prestige des Nations unies et pour les intérêts du monde libre de manière générale.