Flashmag Digizine Edition Issue 114 February 2021 | Page 21

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Patrice Lumumba, à gauche, est accueilli à l'aéroport de Bruxelles en janvier 1960

«Avec la table ronde, le prestige de Lumumba s’est enrichi. Il est apparu en stratège », expliquent les chercheurs Jean Omasombo et Benoît Verhaegen. «Lumumba, ajoutent les deux auteurs, rejoint la conférence de Bruxelles, qui vient de débuter sans lui, et il y fera aboutir toutes ses exigences. Plus radical que la plupart des autres délégués congolais, il refuse que le gouvernement de la métropole se voie réserver quelque pouvoir, il rejette vivement l'hypothèse du roi des Belges ou de son père Léopold III à la tête du Congo indépendant, il exige que tous les rouages ​​du pays soient aux mains de Congolais ».

La première partie de la table-ronde prend fin le 20 février 1960. Une semaine plus tard, le cabinet du Premier ministre belge Gaston Eyskens estime que l'un des premiers objectifs à atteindre est de faire émerger au Congo un gouvernement modéré «fondamentalement disposé à collaborer avec la Belgique », et évitant« d'avoir dans ses rangs, tout au moins dans une position prééminente, des personnalités telles que Kasa-Vubu (intérêt strictement régional) »ou Patrice Lumumba qui risquerait de faire« le jeu de l «Est» 2. L’un des membres de ce cabinet ne nous quittera plus jusqu’à la mort de Lumumba: il s’appelle Harold d’Aspremont Lynden. Cet homme, issu de la noblesse namuroise, est alors directeur de cabinet adjoint d’Eyskens.

Le 1er mars, ce collaborateur du Premier ministre a une nouvelle séance de travail, cette fois-ci avec le professeur Arthur Doucy, un conseiller en question africaines. Les deux hommes réfléchissent à un plan d’ensemble sur la gestion du Congo dans les mois à venir. « L’homme à éliminer est Lumumba » conviennent les deux responsables qui font deux préconisations : « Dans toute la mesure du possible faire valoir ses contacts avec l’étranger » et regrouper les forces politiques qui lui sont opposées

Le 10 mars, d’Aspremont Lynden écrit cette fois-ci une lettre à Paul de Woot de Trixhe, l’administrateur adjoint de la Sûreté de l’État, par laquelle il demande « que l’on puisse recueillir en une synthèse tous les éléments que nous possédons sur les contacts avec l’Est et le parti communiste de Lumumba et de son entourage ». La note de la Sûreté qui lui est remise et qu’il transmet le 16 au ministre Raymond Scheyven est cependant peu inspirée sur les liens du leader congolais avec le communisme international..

Les élections congolaises de mai 1960 permettent l’émergence d’une majorité emmenée par le MNC-L, l’aile du MNC qui suit Lumumba. Il faut malgré tout plusieurs semaines de tractations et de tensions politiques pour en arriver, une semaine avant la proclamation de l’indépendance, à l’investiture du gouvernement dirigé par Patrice Lumumba. Quand le 30 juin 1960, Patrice Lumumba prend la parole lors de la cérémonie d’indépendance et prononce le discours historique qui va fâcher le roi Baudouin, il est donc déjà perçu par les Belges comme un dirigeant politique gênant.