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m o t du m  l e Un patrimoine en ruines Sbeitla Juste après la révolution, les Tunisiens s’étaient indignés de voir la maison de la fille du président déchu intégrer des éléments archéologiques à sa hotte de cuisine ou à l’un de ses lavabos. La colère fut aussi éphémère que la durée de vie d’une libellule… car après son éruption, le volcan s’est rendormi comme si de rien n’était. Il est en effet inutile de nous voiler la face : le Tunisien n’a que faire de son patrimoine culturel. A ses yeux, il s’agit ni plus ni moins que de ruines laissées en guise de décoration. Aux yeux des archéologues, historiens et touristes qui s’y connaissent un tant soit peu, il s’agit d’un témoignage inestimable de notre passé. En France, en Autriche, en Espagne, en Italie ou en Allemagne, le patrimoine culturel est constamment mis en valeur, chouchouté, exploité. Chaque année, par exemple, les Journées Européennes du Patrimoine permettent un accès gratuit à des dizaines de milliers de monuments, châteaux, manoirs ou parcs habituellement payants ou fermés au public. Un rendez-vous incontournable et bien organisé dont le but est d’encourager les citoyens à (re)découvrir leur passé pour mieux l’aimer et le respecter. Ne parlons même pas des arènes, comme celles de Nîmes ou d’Orange, qui accueillent régulièrement des opéras. Il n’est pas nécessaire non plus d’évoquer tous ces édifices, comme les hôtels de villes, dont la façade est décorée d’impressionnants jeux de lumière pour les grandes occasions ou, justement, les festivals de Lumière. Pendant ce temps-là, en Tunisie, des sites archéologiques mondialement connus ne proposent même pas de guides, fascicules ou guides audio à leurs visiteurs. Les Thermes d’Antonin (Carthage), par exemple, n’ont ni guide texte, ni guide audio et encore moins de panneaux informatifs lisibles. En 2017, Carthage ressemble davantage à un site abandonné qu’à un site archéologique qui accueillait jadis des centaines de touristes par jour. Aziz Béjaoui 44 45