L’art devient un moyen de se réapproprier la
chose banale, de créer une valeur à partir de peu.
Mais c’est surtout donner forme et apprivoiser,
souvent avec dérision, le quotidien chaotique
et la déconfiture politique du pays. Sur certaines
sculptures, je remarquais parfois ces clous plantés
rappelant ceux des statuettes du Bas-Congo. Dans
la tradition africaine, les guérisseurs les enfonçaient
pour activer les pouvoirs de la statuette et jeter un
sort de vengeance ou de guérison. Est-il encore
possible d’être protégé par un objet ? Certaines
sculptures regardent vers l’intérieur, celles-là ne
s’éveilleront plus. D’autres, il est vrai semblent
encore monter la garde, le visage dur et rugueux,
de la même substance que le tonnerre d’ici, au
fracas compact, comme retournant d’un coup
toute la roche des mornes.
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