Ensemble intercontemporain 2015-16 musical season Brochure de saison 2015-2016 | Page 56
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OUVRIR PORTES ET FENÊTRES Cahier découvertes
TISSAGE ET MÉTISSAGE
Entretien avec FRANÇOIS ROSSÉ
compositeur
Le compositeur François Rossé se passionne depuis plus de trente ans pour les initiatives pédagogiques les
plus diverses. Le 2 février 2016, il mettra sa longue expérience au service d’un concert participatif unique en
son genre, réunissant sur une même scène des élèves d’école primaire et de collège et les solistes de l’Ensemble
intercontemporain. Aperçu de ce projet original par son créateur.
François Rossé, comment envisagez-vous
le travail avec les enfants et les solistes de
l’Ensemble intercontemporain ?
Pour ma part, il n’y a pas de fossé entre
enfant et adulte : ce sont simplement les
moyens d’expression qui peuvent s’affiner avec l’expérience. Cela dit, s’agissant
de réception et de mémoire, les enfants
sont étonnants. Ils ne sont pas dupes et si
l’on évite de les infantiliser, ils sont heureux d’être intégrés dans une démarche
qui les grandit. Si l’œuvre est forte et cohérente, si les musiciens professionnels
sont, comme ici, des virtuoses prenant
volontiers le terme de « pédagogie » dans
son sens étymologique, les enfants sont les
premiers à le ressentir, et ce en raison de
leur capacité intuitive peu altérée par des
formations parfois en éteignoir.
Sur le papier, ce projet est passionnant
quoiqu’un peu stressant, puisque ce sont
des enfants non musiciens dont il faut optimiser la « fonction ». Ces enfants seront
encadrés sur la durée de l’atelier par des
musiciens adultes : ma première tâche
sera donc de clarifier avec ces adultes les
points essentiels du travail à venir, tout
étant abordé essentiellement à l’oral. Le
rôle des enfants participera des aspects
dynamiques et rythmiques, et de formes
d’énergie dans la production sonore, en
référence aux sites géographiques traversés musicalement au cours du spectacle
– Pays basque, Japon, Argentine. L’idée est
de leur donner à faire des gestes qu’ils
pourront interpréter de manière accomplie, avec un résultat d’un niveau professionnel. C’est pourquoi je veux limiter
la pratique du chant : pour être efficace,
cette pratique nécessiterait un minimum
de formation vocale préalable, ce qui n’est
pas le cas.
La collaboration avec l’Ensemble
intercontemporain sera plus classique :
l’œuvre est conçue pour être abordée avec
une certaine autonomie entre les musiciens et les enfants.
Japonais Susumu Yoshida et l’Argentin
Juan Arroyo) impliquant trois régions
géographiques et culturelles différentes.
La question posée, délicate, est celle des
métissages, du patrimoine génétique, des
mémoires sous-jacentes dans l’organisme.
Il m’est arrivé de concevoir un duo violon/
guitare intitulé Taïgo qui peut se résumer
dans la rencontre entre une Japonaise et
un Argentin : comment sera le bébé ? Non
pas une somme, mais un produit. Jouer
avec les mémoires, les fusionner dans une
véritable synergie plutôt qu’une simple
superposition donne lieu à des questions
d’écriture passionnantes.
Vous mentionnez le Pays basque, le
Japon, l’Argentine : quel voyage musical
nous proposez-vous ?
Pour les enfants, j’espère qu’ils ressentiront la joie d’avoir accompli une action
dont ils sont les héros, et qu’ils sauront
prendre conscience qu’il existe d’autres
types de vécus que ce que proposent les
médias de masse, en développant leur
esprit critique positif. Mais surtout, il
Le thème du spectacle m’a été spontanément donné par le choix des trois compositeurs (le Basque Félix Ibarrondo, le
Au-delà de la représentation elle-même
du spectacle, qu’espérez-vous de ce projet, dans son ensemble – à la fois pour
vous-même et pour les enfants ?