Colloque Julius Koma COLLOQUE corrigé le 4 juin 2017 | Page 83

Intervenante : Au sujet de ces femmes pleureuses qui sont montrées dans le film, qui sont ces femmes ? Cette pratique se transmet – elle de mère en fille ? Que disent-elles ? Parce qu’elles articulent, elles font des paroles, ce ne sont pas que des pleureuses, elles disent quelque chose, font-elles leur office pendant longtemps ? Combien de temps est-ce que ça dure ces pleurs construits ? Enrico de Pascale : Ces dames on les appelle les prefiche en italien, effectivement cet art se transmet de mère en fille, en plus de pleurer, elles récitent des prières, dans lesquelles elles évoquent Dieu, la Sainte Vierge et tous les Saints. Dans notre monde actuel assez laïcisé ne tient plus vraiment compte de ces rituels, de ces passages de la vie à la mort. C’est ce que l’artiste voulait montrer dans sa vidéo, effectivement, ce n’est pas vraiment lié à la place de l’artiste dans le monde actuel. C’est un artiste, pas un historien de l’art, donc il essaye de transmettre ce message au public qui regarde la vidéo de manière artistique, selon ses propres mots et ses propres moyens. Adrian Paci dans toute son œuvre essaye de faire dialoguer l’orient et l’occident, même si l’Albanie ne se trouve pas vraiment en orient, mais il essaye de nous montrer tout ce qu’on abandonne dans notre société laïcisée. Ce n’est pas un hasard si son artiste préféré c’est Pasolini. Jean-Pierre Denefve : Voilà, on comprendra qu’on a basculé dans le registre que nous connaissons mieux : l’art. Pour les quelques artistes qui sont là, cet après-midi il y a aura deux interventions qui porteront sur la « couleur » artistique du projet. On a parlé de Gina Pane, nous aurons en fin de journée l’intervention de Daniel Aulagnier ici présent qui a travaillé avec Gina Pane et qui fera « un exercice », une performance, qui n’a pas du tout de lien avec Gina Pane. Daniel Aulagnier : Il faut préciser parce que par rapport à la douleur, moi qui ai travaillé pendant des années avec elle, elle ne souffrait pas du tout, elle calculait les endroits où elle devait s’entailler, c’est une chose importante rarement écrite dans l’histoire de l’art, à laquelle il faut faire attention. Jean-Pierre Denefve : En 2007, un colloque sur les rapports entre l’art, « l’anatomie, trois siècles d’évolution des représentations du corps » nous nous sommes aperçus qu’il y avait parfois un fossé qui sépare les scientifiques et les artistes, fossé qui, me semble-t-il est aujourd’hui creusé de 83