Colloque Julius Koma COLLOQUE corrigé le 4 juin 2017 | Page 53

Stéphane Hendrick : On m’a demandé de vous faire un exposé sur la monstration de la mort, si elle peut provoquer des traumatismes psychiques. C’est une question bien pointue. Sans effleurer tout de suite la réponse, je me vois contraint de prendre une petite précaution oratoire. Cet exposé va suivre le plan suivant : je vais d’abord puisque c’est dans le titre parler de la notion traumatisme et puis je vais essayer de développer l’idée selon le fil conducteur suivant : nous sommes invités à vivre avec l’idée de la mort ce qui est tout à fait différent de vivre dans l’idée de la mort. D’abord la notion de trauma et de traumatisme psychique. Quelques balises conceptuelles. J’essaierai de ne pas être trop théorique mais il faut aborder un certain nombre de concepts pour pouvoir répondre à cette question. La notion de crise d’abord ; c’est une notion sur laquelle beaucoup ont réfléchi dans le domaine de la psychologie clinique et en particulier dans les interventions « de crises ». Il s’agit d’un phénomène brusque et intense en principe qui se déroule sur une période limitée et qui laisse prévoir un changement décisif. C’est-à-dire qu’il y a un avant et un après la crise et l’après est réputé ne plus être tout à fait pareil à l’avant. Quant à la notion de stress c’est avant tout et d’abord une réaction physiologique qui prépare l’organisme à se défendre contre une agression d’un point de vue éthologique. Trois réponses bien classiques nous sont aujourd’hui bien connues, ce sont les fameux 3F : Flight, Flew, Freeze. - combattre, fuir, se pétrifier-. On va voir que ces notions sont tout à fait pertinentes chez l’homme même si elles ont été surtout et d’abord été mises en exergue dans le monde animal. Sans entrer trop dans les détails, il y a un stress, sub consécutif à une crise qui peut être considéré comme étant de l’ordre de la normalité puisque dès lors que se déclenche un système d’alarme, le stress permet la préparation à l’action, l’action elle-même en termes de résistance. Celui-ci conduit à un moment d’épuisement qui amène récupération et régénération complète. Nous avons besoin du stress pour survivre. Par contre, il y a une autre notion de stress aigu ou de stress dépassé quand la phase de récupération que je viens d’évoquer il y a quelques instants ne peut plus se mettre en place. On assiste à un état de sidération voire d’effroi. On observe des comportements désorganisés. Et notamment des comportements de fuites ou de freeze, de gel. La syncope est un exemple de ce type de comportement. Des actions automatiques sont persistantes. C’est-à-dire que le sujet se met à exécuter ses taches sans réfléchir, sans être même présent dans la situation. J’insiste sur le mot persistant parce que les actions automatiques sont presque nécessaires. Chez les personnes qui doivent intervenir dans les interventions de crise aigüe, ceci leur permet de pouvoir avoir des gestes efficaces sans être perturbées, submergées par l’émotion. Néanmoins ça devient délétère si ces réactions persistent au-delà de l’intervention. La notion de trauma est consécutive donc à des notions de stress extrême. Vous avez ici une petite liste d’événements susceptibles de provoquer ces stress, et qui aboutissent à un choc. C’est une notion quasi instantanée. La notion de trauma renvoie aussi généralement à une idée de confrontation au règne de la mort, soit qu’on a soi-même échappé à la mort soit qu’on a été témoin direct d’événements vécus par des personnes qui y ont échappé, ou éventuellement sont mortes. Ceci renvoie aussi à un vécu d’effraction psychique et d’effroi comme je viens de l’indiquer précédemment. La notion de traumatisme, elle, renvoie à une notion qui s’étale plus par ses effets dans la durée. 53