Colloque Julius Koma COLLOQUE corrigé le 4 juin 2017 | Page 106

QUESTIONS DE LA SALLE Table ronde et échanges Stéphane Louryan :
Je voudrais répondre à une question qui a été posée à propos de Von Hagens . Il est clair qu ’ il y a une marchandisation de ce que fait Von Hagens . Hors d ’ un contexte pédagogique qui n ’ est pas moins présent . L ’ idée initiale c ’ est quand même , je pense , de faire du bénéfice . J ’ ai eu l ’ occasion de lire la documentation de Von Hagens et j ’ ai eu , au cours , l ’ occasion de m ’ exprimer avec des gens qui voulaient léguer leurs corps à notre laboratoire de façon officielle pour l ’ enseignement de l ’ anatomie . Les motivations de ceux qui lèguent leur corps , qui souhaitent que leur corps puisse être exhibé ou utilisé après la mort , sont totalement différentes . Ceux qui lèguent leur corps dans un laboratoire scientifique , dans un contexte scientifique essentiellement , le font généralement pour être utiles au-delà de leur mort , pour servir à la formation , à la recherche . Je pourrais même ajouter qu ’ un de mes lointains prédécesseurs avait souhaité que son corps fût disséqué par ses successeurs et mis à disposition des étudiants . Il souhaitait pouvoir encore enseigner après sa mort . Par contre , dans les brochures de Von Hagens , on entend : « moi quelque part , je veux me perpétuer , je veux me survivre à moimême , qu ’ on me voie encore ». Quelle était la volonté de Julius Koch d ’ être ou non exhibé , volonté dont nous n ’ avons bien sûr aucune trace ? Je pense que cette volonté est extrêmement différente selon qu ’ on souhaite de façon complètement désintéressée servir aux autres pour les progrès de l ’ humanité d ’ une part , ou vouloir , par une espèce d ’ égoïsme et de soucis prométhéen de l ’ immortalité , se survivre à soi-même . C ’ est vraiment extrêmement différent dans les volontés de ceux qui participent d ’ un système ou d ’ un autre .
Jean-Pierre Denefve :
Est-ce que vous pensez que le don du corps devrait être strictement conditionné ou inconditionné à ce qu ’ on en fait ? Je me souviens d ’ un temps , à la suite de l ’ affaire Pandy et la publication de la fameuse « Ferme des morts » au Canada , ce centre de recherches qui est conçu pour la police scientifique ( on effectue là notamment des enquêtes et des recherches balistiques sur les corps ), à un certain moment , un certain nombre de donateurs potentiels ont découvert une image peu romantique de ce que la médecine allait faire de leurs restes . Est-ce que vous ne pensez pas qu ’ il faudrait que ce don soit inconditionnel , c ’ est-à-dire qu ’ on effacerait du don l ’ idée parfois poétique de l ’ usage qu ’ on peut en faire ?
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