6 Jorella Andrews, « Critical
Materialities », A.C.A.D.E.M.Y.
Revolver, Francfort-sur-le-Main,
2006, p.178-186
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riques, ses écrits nous rapprochent de l’art ;
l’auteur s’attarde sur de longues descriptions d’œuvres (des icônes byzantines, des
peintures de Cézanne, une installation de
Liam Gillick)6. Mieux encore, elle nous propose autre chose qu’un cadre théorique à
plaquer sur des ressentis d’expositions. Elle
nous offre un filet, celui-ci même qui nous
rattrape lorsqu’à la sortie d’une exposition
nous nous écrions « Je n’ai rien compris ».
Je ne parle pas ici du divorce entre l’art
contemporain et le public de l’art, mais du
sentiment que les œuvres dans l’exposition
menaient une vie autonome. Indépendantes
de notre regard, ne cherchant aucune complicité avec nous, elles se répondent les unes
aux autres au niveau de la forme et de la
matérialité. Se profile ici une esthétique relationnelle orientée-objet, mentionnée précédemment, qui révèle d’autres centres de
gravités relationnelles. Le sujet, l’humain
n’est plus au centre, il participe à cette nouvelle équation relationnelle avec d’autres éléments apportés et ceux existants.
qui fonctionnent lorsque la prise est débranchée. Un verre posé sur une table improvisée à partir de planches de MDF tournait
imperceptiblement. Une radio émettait des
fréquences dans un périmètre circonscrit par
l’artiste. Autant de signes sensibles qui s’appréhendent avec notre intuition. Le projet de
Bishop (sa proposition artistique) préexiste
aux idées, et pourtant il semble s’en nourrir. En sortant de l’exposition, l’impression
d’avoir été témoin d’une bizarrerie créative
se fit ressentir ; la frustration de n’avoir pas
tout saisi était moteur pour autre chose. La
théorie, celle d’Andrews, était soudainement
devenue réconfortante.
Julia Marchand est commissaire d’exposition et
travaille à la Fondation Vincent van Gogh Arles
auprès de Bice Curiger en tant qu’assistante curatoriale.
Elle vient d’ouvrir l’exposition « Irony Comes From
a Vanishing Point » à la galerie Stereo (Pologne),
comprenant les oeuvres des artistes Emmanuelle Lainé,
Stéphane Barbier Bouvet, Steve Bishop et Bea
Schlingelhoff.
En se frottant à cette nouvelle altérité
non animée, notre champ de conscience en
est plus élargi : on conçoit davantage les énergies animistes, celles volcaniques, minérales.
L’exposition personnelle de Steve Bishop à la
galerie Carlos Ishikawa, « An Escalator Can
Never Break, It Can Only Become Stairs » en
2013, insinue l’existence d’objets autonomes
Avril—Octobre 2016
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