Art & Inspiration N° 2 - Summer-Fall / Été-Automne 2013 | Page 53

nombreuses pertes, comme je le disais précédemment : mon père a disparu, c’était un foyer un peu barré. Alors je me réfugiais dans l’écriture. J’ai tenu un journal dès le CE1 ou le CE2, où je pouvais dire la vérité et comprendre ce qui se passait. Beaucoup d’écrivains sont des témoins, des observateurs. Enfant, je me sentais étranger dans ma propre maison, je regardais toutes ces choses qui se passaient sous mes yeux et je voulais les enregistrer. J’avais le sentiment que si je ne racontais pas ces histoires, personne ne les dirait jamais. Et j’aimais ces gens et ça me rendait triste ce qui se passait et je voulais que ça compte tout ça. Or, raconter des histoires c’est donner du sens aux choses, et c’est aussi comprendre ce qu’elles signifient. C’est pour ça que pour moi, dès mon plus jeune âge, ça a été nécessaire. C’est grâce à ça que j’ai survécu et quand j’ai eu mon diplôme en sortant de la fac, j’ai réfléchi à comment en faire mon métier, je suis donc venu vivre à New York et je suis devenu journaliste et rédacteur. Je suis resté dans le milieu de la presse quelques temps.

A&I : En plus d’écrire des livres à présent, vous menez également des ateliers ?

MM : Oui, j’adore ça. Cela fait seulement 6 ou 7 ans que j’enseigne en ligne et que je donne des ateliers. Ça me prend la moitié de mon temps à présent. J’adore travailler avec des gens. J’adore partager ce que j’ai appris depuis une vingtaine d’année, non seulement sur l’écriture mais aussi sur le fait d’être un être humain, les principes que nous sommes en train d’aborder : la survie, dire la vérité, et ce qui se passe quand notre histoire change. Les ateliers que je donne concernent tous la recherche personnelle, l'introspection, et la découverte de ce génie, cet outil créatif que nous avons tous en nous-mêmes. Ça n’est pas forcément artistique. Ça peut être jardiner, travailler avec des enfants… peu importe la forme que ça prend, mais aider les gens touche à la source de leur créativité, et je trouve très inspirante la façon dont ça les change et leur donne vie.

A&I : Comment exploiter son génie créatif ?

MM : Beaucoup de gens vous diront “Oh, je ne suis pas créatif.” Ce sont ces personnes que je préfère. Ça m’amène à toquer à leur porte et dire “Ah vraiment ?” Et d'ici la fin du week-end, ils sont en quelque sorte épatés, ils sont fascinés par des colibris ou ils adorent prendre des photos, ou autre. La première étape est donc de dépasser cette idée qu'ont certaines personnes qu'elles ne sont pas créatives. Et c'est aussi aider les gens à comprendre qu'être créatif, ça ne veut pas dire faire carrière en tant qu'artiste. Ça veut juste dire que vous vous rendez compte que vous aimez la couleur, le son ou danser. C'est très simple. Une des choses que je fais est de leur demander à quoi ils étaient doués quand ils étaient enfants. Est-ce qu'il y a quelque chose qu'ils adoraient, pour laquelle ils étaient plutôt doués, qu'ils ont peut-être laissé de côté en grandissant, en cherchant un travail, en se conformant à la société ? C'est une des façons de faire. L'autre façon est de se demander: que voulons-nous ? Qu'est-ce qu'on veut vraiment ? C'est généralement ce qui mène à ce l'on souhaite créer.

A&I : Ce sont des questions vraiment utiles parce que souvent on ne pense pas à s'arrêter pour se demander ce genre de choses.

MM : On est trop pris par notre vie de tous les jours, trop occupés à survivre, à gagner notre vie, à avancer, à élever des enfants, à affronter les aléas de la vie. Beaucoup de gens ne s'autorisent pas à dire “Qu'est-ce que je veux vraiment ? Dans quoi suis-je bon ?”

"What are your desires? What do you truly want? That is often a doorway to what we want to create."

"Que voulons-nous ? Qu'est-ce qu'on veut vraiment ? C'est généralement ce qui mène à ce l'on souhaite créer."

- Mark Matousek

it’s also helping people understand that being creative doesn’t mean that you have to have a big career as an artist. It just means that you realize you love color or you love sound or you like to dance. It’s very simple. And one way I do it is by asking people what they were really good at as children. Is there something that they just loved, that they were usually good at, that they may have lost touch with in growing up, in making a career, in conforming? That’s one way of doing it. And the other way of doing it is to ask yourself: What are your desires? What do you truly want? And that is often a doorway to what we want to create.

A&I: Those are very helpful questions because sometimes we don’t pause to ask ourselves those things.

MM: We’re too busy in our ordinary lives, we’re too busy surviving – making a living, getting on, raising kids, dealing with those slings and arrows of life. It’s a luxury that a lot of people don’t give themselves, to say, “What do I really want? What am I good at?”

A&I: In your workshops, do you also explore how people can develop their writing styles?

MM: Absolutely. My workshops started as writing workshops to help people improve their skills as memoirists or whatever kind of writing they do, to develop a clear voice on paper. So that was the

© Mark Matousek